4.4 Les glaciations du Pléistocène

Durant le Pléistocène, entre 2,6 millions d’années et 11’650 ans avant aujourd’hui, une vingtaine de glaciations se sont succédées, entrecoupées d’autant de périodes interglaciaires. Lors du dernier maximum glaciaire (LGM), entre 27’000 et 22’000 ans cal BP, une grande partie de la Suisse était recouverte par les glaciers. Durant le retrait généralisé des glaces qui a suivi (période tardiglaciaire, entre 19'000 et 11’650 avant aujourd’hui), les glaciers ont encore connu quelques phases de réavancées, avant d’atteindre, durant l’Holocène (de 11’650 ans cal BP à aujourd’hui), des positions proches de leurs extensions actuelles.

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Les oscillations climatiques extrêmes du Quaternaire s’expliquent essentiellement par les variations des paramètres orbitaux de la Terre (voir les cycles de Milankovitch, fiche glaciers 4.2), ceci dans un contexte paléoclimatique général en refroidissement depuis l’Eocène. Cette tendance au refroidissement depuis l’Eocène est quant à elle liée à des facteurs tectoniques qui ont eu des répercussions globales sur le climat (par exemple la formation de l’Isthme de Panama conduisant à la création du Gulf Stream).

L’analyse isotopique des foraminifères benthiques récoltés dans les carottes de sédiments marins, a permis de mettre en évidence qu’une vingtaine de glaciations et autant de périodes interglaciaires ont eu lieu durant la période Quaternaire, selon une périodicité d’environ 100’000 ans. Ceci a beaucoup complexifié le modèle très simple à quatre grandes glaciations (Günz, Mindel, Riss, Würm) proposé par Penck & Brückner (1909) sur la base des terrasses de ces affluents du Danube. Dans un premier temps, l’ancienne terminologie a été remplacée par une nomenclature simple, dans laquelle on parle de glaciation maximale, avant-dernière glaciation et dernière glaciation (fig. 1). Récemment, une nouvelle terminologie basée sur des affleurements ou des relevés de forages situés dans le Nord de la Suisse a été définie par le Comité suisse de stratigraphie (fig. 2). On y distingue les glaciations de Möhlin (correspondant à la plus étendue), Habsburg, Hagenholz, Beringen et Birrfeld. Ces noms proviennent de localités-types présentant des enregistrements stratigraphiques et/ou des morphologies glaciaires/proglaciaires typiques.

C’est pendant ces grandes avancées et retraits que la glace a peu à peu sculpté le paysage actuel, et c’est au cours de la dernière glaciation (Birrfeld en Suisse, anciennement Würm 115’000 – 10’000 BP), que le relief a pris sa forme actuelle.

Durant le dernier maximum glaciaire (LGM), la glace a atteint son niveau maximal entre 27’000 et 22’000 ans cal BP. A ce moment-là, la température annuelle moyenne était de 8 à 10°C plus froide par rapport à aujourd’hui. Le glacier du Rhône, à cette époque, se divisait en deux grands lobes, l’un parcourant le Moyen-Pays suisse et se terminant à Wangen an der Aare, et l’autre, en France, atteignant la région de Culoz. Le «lobe lyonnais» (fig. 3), anciennement attribué au glacier du Rhône, marquait la terminaison des glaciers en provenance des vallées de l’Isère et de l’Arc. À partir d’environ 20’000 BP, le climat a commencé à se réchauffer grâce à une augmentation de l’intensité du rayonnement solaire dans les hautes latitudes de l’hémisphère Nord.

Après le dernier maximum glaciaire (LGM), la déglaciation n’a pas été constante. Dans les Alpes, on distingue au moins six récurrences glaciaires de moins en moins marquées (fig. 4). De 19’000 à 12’700 avant aujourd’hui, la différence de température par rapport à aujourd’hui est passée de -8°C (début du Dryas ancien) à -1°C (fin de l’interstade Bølling-Allerød). Cette période, le Tardiglaciaire, s’est terminée par un refroidissement brutal, celui du Dryas récent (12’700 à 11’700 avant aujourd’hui), marqué par une importante récurrence des glaciers alpins qu’on retrouve dans le paysage actuel sous la forme de moraines du stade d’Egesen (fig. 5). Il est intéressant de noter qu’avant ce refroidissement brutal (de -2 à -3°C dans les Alpes), une bonne partie des glaces quaternaires avait déjà fondu.